Commission de Venise - Observatoire des situations d'urgence

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Avis de non-responsabilité: ces informations ont été recueillies par le Secrétariat de la Commission de Venise sur la base des contributions des membres de la Commission de Venise, et complétées par des informations disponibles à partir de diverses sources ouvertes (articles académiques, blogs juridiques, sites Web d'information officiels, etc.) .

Tous les efforts ont été faits pour fournir des informations exactes et à jour. Pour plus de détails, veuillez visiter notre page sur le COVID-19 et les mesures d'urgence prises par les États membres: https://www.venice.coe.int/WebForms/pages/?p=02_EmergencyPowersObservatory&lang=FR


  Monaco

1.     La constitution de votre pays comporte-t-elle des dispositions spécifiques applicables aux situations d'urgence (guerre et/ou autre urgence publique menaçant la vie de la nation)?

Il n’existe pas de dispositions constitutionnelles spécifiques.

2.     Existe-t-il dans votre pays des lois organiques/constitutionnelles ou ordinaires régissant l'état d'urgence ?

Il n’existe pas de dispositions spécifiques de cette nature. Cependant, la loi 1.430 du 13 juillet 2016 portant diverses mesures relatives à la préservation de la sécurité nationale dispose que « 1- La police administrative a pour objet : de déceler, d'identifier, de prévenir et de faire cesser toute menace susceptible de porter atteinte à l'ordre public, à la sécurité des personnes et des biens ainsi qu'aux intérêts fondamentaux de la Principauté ». Ces compétences appartiennent au ministre d’Etat.

3. Existe-t-il dans votre pays des lois organiques/constitutionnelles ou ordinaires sur les risques sanitaires ou autres situations d'urgence?

Il existe une loi 1-283 du 7 juin 2004 relative à l’organisation de la sécurité civile qui prévoit la mise en œuvre de plusieurs catégories de plans d’urgence, et notamment un plan « Ormose » qui a pour objet de faire face aux risques majeurs.

On relèvera que les mesures prises à Monaco dans le cadre de cette crise sanitaire l’ont été essentiellement en référence au règlement sanitaire international de l’OMS, rendu exécutoire à Monaco et mis en œuvre par les Ordonnances souveraines n° 3.153 du 24 février 2011 et 6.387 du 9 mai 2007.

On relèvera également, que les dispositions générales applicables en temps de crise sanitaire ne relèvent pas d’un système législatif spécifique.

La cadre normatif est donc le suivant :
-Le règlement sanitaire de l’OMS visant à lutter contre les épidémies ;
-la loi de 1-238 de sur la sécurité civile de 2004 ;
-la loi 1.430 sur la préservation de la sécurité nationale de 2016 qui attribue compétence au Ministre d’Etat en cas de menaces susceptibles de porter atteinte, notamment, à la sécurité des personnes.
-l’Ordonnance de Souveraine du n° 6.387 du 9 mai 2017 qui, dans le cadre de la réglementation précitée de l’OMS et en cas de menace d’épidémie, attribue au Ministre d’Etat les compétences pour prendre les mesures permettant de faire face à ces menaces.

Il s’agit donc de compétences attribuées au Ministre d’Etat s’exerçant dans le cadre d’une situation d’urgence sanitaire telle que définie par des normes de l’OMS.

4. L'état d'urgence a-t-il été déclaré dans votre pays en raison de la pandémie Covid-19 ? Par quelle autorité et pour combien de temps?

Il n’y a pas à Monaco de législation spécifique relative à l’état d’urgence sanitaire lié à la pandémie. Il n’en reste pas moins qu’un certain nombre de décisions ministérielles ont été prises dans un contexte d’urgence sanitaire.

Il en est ainsi de :
-la Décision ministérielle du 13 mars 2020 relative à la fermeture de certains établissements accueillant des enfants ;
- la Décision ministérielle du 17 mars 2020 relative à la fermeture de certains établissements scolaires ;
- la Décision ministérielle du 17 mars 2020 portant réglementation temporaire des déplacements du 18 au 31 mars 2020 ;
-la Décision du 19 mars 2020 portant réglementation temporaire de l’accès du public au rivage et eaux maritimes monégasques ;
-la Décision du 19 mars 2020 portant réglementation temporaire de l’accès du public aux équipements et espaces publics extérieurs ;
-la Décision ministérielle du 22 mars 2020 portant restriction temporaire des déplacements nocturnes et interdisant tout déplacement du 22 mars au 31 mars 2020 entre 22 heures et 5 heures ;
-la Décision ministérielle du 27 mars 2020 portant modification des décisions relatives à la réglementation temporaire des déplacements et à l’accès à certains lieux ou équipements ;
-la Décision ministérielle du 31 mars 2020 relative aux mesures de prévention à respecter par toute personne ;
-la Décision ministérielle du 10 avril 2020 prorogeant la Décision précitée du 17 mars jusqu’au 15 avril 2020 ;
-la Décision ministérielle du 10 avril prorogeant les dispositions précitées jusqu’au 3 mai 2020 ;
-la Décision ministérielle du 16 avril 2020 portant prorogation des mesures de fermeture de certains établissements recevant du public ;
-la Décision ministérielle du 22 avril 2020 relative à la fermeture de certains lieux et établissements ;
-la Décision ministérielle du 28 avril 2020 prévoyant la reprise progressive d’activités à compter du 4 avril 2020 ;
-la Décision ministérielle du 14 mai 2020 modifiant la décision du 28 avril 2020, relative à la reprise progressive d’activité.

On relèvera, dans un ordre différent, que la loi n° 1.485 du 9 avril 2020 a suspendu les délais administratifs.

On relèvera, enfin, que ces dispositions ont été prises pour des durées brèves et renouvelées dans un souci de stricte proportionnalité entre la nécessité à laquelle elles répondent et les restrictions qu’elles imposent. Par ailleurs ce principe de proportionnalité est rappelé dans l’exposé des motifs des décisions ministérielles précitées.
Plus précisément ces décisions se réfèrent précisément à l’objectifs poursuivi de santé publique, aux circonstances de temps et de lieu dans lesquelles elles sont édictées.

5. La déclaration pouvait-elle être, et a-t-elle été soumise à l'approbation du Parlement (si elle a été prise par l'exécutif)?

Les mesures de police administrative ont été prises par l’exécutif au regard de la répartition des compétences résultant de la Constitution monégasque. Il n’y a pas eu, en ce sens, de déclaration d’urgence.

6. La déclaration pouvait-elle être, et a-t-elle été soumise à un contrôle judiciaire ? A-t-elle été jugée justiciable?

En l’absence de déclaration d’urgence, les décisions ministérielles auraient pu faire l’objet d’un recours devant le Tribunal suprême, en vertu de l’article 90 de la Constitution. Pour le moment, de tels recours n’ont pas été diligentés.

7. Des dérogations aux droits de l'homme sont-elles possibles dans des situations d'urgence en vertu du droit national? Quelles sont les circonstances et les critères requis pour déclencher une exception? Une dérogation a-t-elle été faite en vertu de l'article 15 de la CEDH ou de tout autre instrument international? Le droit national interdit-il la dérogation à certains droits, même en situation d’urgence? Existe-t-il une exigence explicite selon laquelle les dérogations doivent être proportionnées, c'est-à-dire strictement limitées, quant à leur durée, leurs circonstances et leur portée, aux exigences de la situation?

Il n'y a eu aucune limitation de portée générale aux droits et libertés. Les restrictions ponctuelles peuvent de manière générale intervenir dans le cadre de la conciliation entre les exigences d'intérêt général et les droits et libertés individuels telle que prévue par la Constitution et la Convention EDH. Elles n'ont pas justifié une mise en œuvre des dispositions de l'article 15 de la Convention EDH. Il s'agit d'un mécanisme proche de celui résultant de la jurisprudence administrative relative aux circonstances exceptionnelles.

En revanche, les dispositions particulières prises par l’autorité administrative ont conduit à limiter la portée d’un certain nombre de droits et libertés.

8. Quels droits de l'homme ont été limités/dérogés dans votre pays, dans le contexte de la pandémie Covid-19?

Les limitations ont porté sur les libertés suivantes : la liberté d’entreprendre, la liberté de réunion, la liberté d’aller et de venir. Des restrictions portant sur leurs conditions d’exercice ont également affecté la liberté du culte et la liberté de l’enseignement

9. Si l'état d'urgence n'a pas été déclaré, l'exécutif a-t-il bénéficié de pouvoirs supplémentaires en vertu de la législation ordinaire sur les risques sanitaires ou d'une autre urgence publique? A-t-il décidé d'imposer des restrictions exceptionnelles aux droits de l'homme sur la base de ces lois?

La déclaration d’urgence n’a pas été faite, puisque la Constitution ne la prévoit pas; mesures nécessaires ont été prises par l’exécutif sur la base d’une législation ordinaire sur les pouvoirs de la police.

10. Est-ce que la possibilité pour l’exécutif de déroger à la répartition normale des pouvoirs en situation d’urgence est limitée quant à sa durée, ses circonstances et sa portée?

La Constitution de Monaco ne prévoit pas l’état d’urgence; le ministre d’État peut utiliser (et s’il est conféré, dans le cadre de l’épidemy COVIDE) les pouvoirs de police qu’il a en vertu de la législation ordinaire. Il n’y a pas eu en l’espèce de dérogation à la répartition des compétences normatives. L’exécutif a agi, dans le cadre d’une réglementation internationale, en vertu de compétences législatives. Les mesures prises rsont susceptibles d’être soumises à un contrôle juridictionnel.

11. Les sessions du Parlement ont-elles été suspendues pendant l’épidémie Covid-19? Si oui, pour combien de temps? Des règles spécifiques sur le fonctionnement du Parlement pendant l'urgence ont-elles été adoptées? Par le parlement ou par l'exécutif?

Non seulement le fonctionnement du parlement n’a pas été interrompu, mais encore a été créé par l’Ordonnance souveraine no. 8.018 du 26 mars 2020 un comité mixte de suivi du COVID composé de représentants du gouvernement et du Conseil national. Les membres du Comité sont non seulement destinataires des informations données par le gouvernement mais disposent d’un pouvoir de proposition.

12. Les sessions judiciaires de la Cour constitutionnelle ou d'une juridiction équivalente et/ou d'autres tribunaux ont-elles été suspendues pendant l’épidémie Covid-19? Si oui, pour combien de temps ? Des règles spécifiques sur leur fonctionnement pendant l'état d'urgence ont-elles été adoptées ? Par le parlement ou par l'exécutif ?

La session du Tribunal suprême d’avril a été annulée mais les justiciables ont conservé la possibilité de saisir le président du Tribunal suprême en cas d’urgence. Par l’Ordonnance Souveraine 8.019 du 26 mars 2020, les délais de recours devant le Tribunal suprême ont été suspendus, à l’exception de ceux qu’implique l’exercice de la procédure d’urgence.

Les audiences des tribunaux et cours ont été annulées du 16 mars au 4 mai 2020 mais toutes les procédures urgentes ont été traitées (contentieux de la détention, audiences de flagrant délit, placement des mineurs ou placement d’office des majeurs en détresse, ordonnances de protection…).

La loi 1.486 du 9 avril 2020 relative à la justice a suspendu pour une durée de deux mois la plupart des délais de procédure et les délais d’audience, avec possibilité de prorogation.

13. La législation sur l'état d'urgence ou sur la situation d'urgence a-t-elle été modifiée ou adoptée pour faire face à la pandémie de Covid-19?

Non, la législation existante sur les pouvoirs de police du ministre de l’État était généralement suffisante pour ordonner des mesures visant à faire face à la crise. Loi 1.486 du 9 avril 2020 relative à la justice suspendue pour deux mois la plupart des délais de procédure et d’audience, avec possibilité de prorogation.

14. Cette législation supplémentaire a-t-elle fait l'objet d'un contrôle judiciaire?

Aucune nouvelle législation n’a été adoptée/modifiée, de sorte qu’il n’y a pas eu de contrôle judiciaire

15. L'état d'urgence a-t-il été prolongé ? Pour combien de temps ? La prolongation a-t-elle été soumise à un contrôle parlementaire ? A-t-elle été soumise à un contrôle judiciaire?

La déclaration d’état d’urgence n’est pas prévue par la Constitution et n’a donc pas été introduite. Toutefois, certaines mesures ministérielles ont été temporairement prolongées.

16. Quels sont les recours juridiques disponibles contre les mesures générales et/ou individuelles prises dans le cadre de l'état d'urgence? Quels sont les recours juridiques contre les mesures prises en application de la législation ordinaire sur les crises sanitaires ? Une modification des recours juridiques disponibles a-t-elle été décidée en raison de l'état d'urgence ou provoquée par celui-ci? Des mesures d'urgence ont-elles été invalidées et pour quelles raisons (compétence, procédure, manque de proportionnalité, etc.).

Le recours contre les décisions ministérielles devant le Tribunal suprême est possible (cf. supra). Il n’y a pas eu, pour le moment, de saisine.

17. Si des élections parlementaires et/ou, le cas échéant, présidentielles étaient prévues pendant l'urgence de Covid-19 : ont-elles eu lieu? Des dispositions particulières ont-elles été prises et, si oui, lesquelles ? A-t-il été nécessaire de modifier la législation électorale? Quel a été le taux de participation? Comment a-t-elle été comparée à celle des élections précédentes? Si elles ont été reportées, quelle était la base constitutionnelle ou légale pour le faire? Qui a pris la décision? Pour combien de temps ont-elles été reportées? Cette décision a-t-elle été soumise à un contrôle parlementaire ou judiciaire ?

Sans objet

18. Mêmes questions que sous 17, mutatis mutandis, en ce qui concerne les élections locales et les référendums.

Sans objet